Des entreprises comme Edenred et Sodexo préparent des cartes prépayées et applis qui permettront aux entreprises de financer 400 euros par an de transports vertueux, comme le permet la loi mobilités.
Après le ticket restaurant, place au titre mobilités. Ce nouveau moyen de paiement en entreprise devrait commencer à apparaître à la rentrée de septembre, après la parution d'un décret prévu cet été, et qui doit apporter quelques précisions réglementaires. Issu de la loi mobilités, le titre mobilités apporte une traduction concrète au forfait mobilités durables, un dispositif facultatif permettant à l'employeur de financer à hauteur de 400 euros par an et sans cotisation des transports considérés comme vertueux, en plus du remboursement partiel de l'abonnement aux transports en commun.
Le titre mobilité permettra notamment de payer des services de covoiturage, d'autopartage (lorsque les véhicules sont à faibles émissions), ainsi que des services de location de vélos, trottinettes et scooters mécaniques ou électriques. Mais aussi de financer l'achat d'un vélo et d'accessoires cyclistes ou encore de recharger son véhicule électrique dans une station. La moitié du forfait pourra également servir à payer des frais de carburant. Le passage à un titre mobilité permettrait de faciliter l'utilisation du forfait mobilité, en accordant à l'avance un crédit aux employés, relié à un compte et à une plateforme numérique permettant aux entreprises de conserver une traçabilité de ces dépenses. Elle éviterait aussi aux salariés d'avancer les montants et de remplir des notes de frais pour se faire rembourser.
Les acteurs du ticket resto s'engouffrent
Plusieurs entreprises ont commencé à se positionner sur ce marché. Notamment Edenred, qui offre déjà des tickets restaurant dématérialisés adossés à des cartes de paiement. "Nous allons proposer un compte numérique accompagné d'une carte à puce rechargeable. Comme pour la carte ticket restaurant, il pourra être enregistré et utilisé depuis des applications de mobilités", détaille Julien Tanguy, directeur général d'Edenred France. Le modèle économique devrait être similaire à celui de la carte ticket restaurant, avec une commission sur les transactions de l'ordre de 3 à 4%.
La start-up Search a développé une offre similaire, mais basée sur une carte virtuelle et sans commission. Sauf si l'entreprise lui délègue la gestion de ses comptes mobilité (une commission de 5% s'applique alors). Search facture 3 euros par mois et par salarié pour ce service. Elle propose également aux entreprises d'aller plus loin, en passant par elle pour gérer toute leur politique de voyage, notamment des moyens de transport qui ne sont pas inclus dans le forfait mobilités durables, comme les VTC ou les taxis. Pour 9 euros par mois et par salarié, Search donne accès à une carte de paiement Mastercard physique et à une appli qui agrège et compare les prix de différents services, tout en permettant à l'entreprise un paramétrage en fonction de sa politique de voyage. "Il est possible d'interdire certains types de services ou certaines marques au sein d'un même service, ou encore d'imposer seulement certaines gammes, comme les VTC électriques", précise Benjamin Nahoumovitch, fondateur de Search.
La bataille du réseau
Le géant de la restauration d'entreprise Sodexo, qui propose toute sortes d'autres services moins connus aux entreprises et a investi dans la start-up de covoiturage Klaxit, est aussi sur le coup. L'entreprise a déjà lancé l'année dernière son Pass Mobilité Durable, proposant des fonctionnalités similaires au titre mobilités durables, mais uniquement pour les covoiturages avec Klaxit. Sodexo a confirmé au JDN son intention d'élargir cette solution à d'autres services, mais a décliné notre demande d'interview, préférant attendre de connaître toutes les modalités de mise en œuvre du titre mobilités pour "affiner" son offre. La fintech Swile (ex-Lunchr), qui propose une carte de titres restaurant, prépare également une offre pour le quatrième trimestre 2020.
Comme le ticket restaurant, le titre mobilités fonctionnera seulement avec des partenaires agréés. Les acteurs qui préparent ces offres sont donc en train de nouer des accords avec les entreprises de mobilités. Il sera essentiel pour ces concurrents de réussir à créer les réseaux de partenaires les plus larges possible. "Nous discutons aussi d'exclusivités pour des services numériques avec des acteurs nationaux, comme le covoiturage", précise Julien Tanguy. "Mais pour ce qui est des mobilités douces en libre-service, il existe une multitude d'acteurs différents en fonctions des villes, nous devrons donc en intégrer un maximum." Le vaste réseau d'entreprises clientes constitué par Edenred et Sodexo devrait également les aider à pousser cette nouvelle offre.
Le potentiel de ce marché est encore incertain. Sur le papier, une manne de 400 euros par an par salarié peut sembler énorme. Mais le forfait mobilités durables étant facultatif, il pourrait ne pas rencontrer de succès au-delà de grands groupes avec des objectifs RSE ou des problématiques d'attractivité. Et avec la crise économique et les vagues de licenciements qui se profilent, nombre d'entreprises pourraient ne considérer le forfait mobilités durables que comme une dépense superflue, puisque non obligatoire. "C'est un marché plus petit que celui du ticket restaurant, qui génère plutôt 1 200 à 1 400 euros par an par salarié", reconnaît Julien Tanguy. "Mais nous pensons qu'il représente tout de même plusieurs centaines de millions d'euros. Car les entreprises doivent s'adapter à de nouvelles normes. Par exemple l'interdiction d'avoir plus d'une place de parking pour quatre bureaux, ce qui va créer de nouveaux besoins de mobilité". Gadget RSE ou véritable outil de changement, le forfait mobilités durables fera en tout cas l'objet d'une évaluation par le gouvernement 18 mois après son entrée en vigueur et pourrait devenir obligatoire s'il ne rencontrait pas le succès escompté dans sa version facultative.
July 01, 2020 at 04:27PM
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Le nouveau marché du titre mobilités, le ticket resto du transport - JDN
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